Relation ville campagne
excédée par la périurbanisation
Martin Vanier
Université Grenoble I, UMR PACTE
Est-il encore bien nécessaire d’instruire en France le procès de la périurbanisation ? Y a-t-il encore un avocat à la défense de la société qui se périurbanise, en dépit de tous les appels à la raison aménagiste : appel à l’idéal du développement durable, au modèle de la ville compacte, à la sauvegarde de l’agriculture et des espaces naturels, à la réduction des déplacements… ? Ou bien, par le retour à la ville-centre – la « vraie ville » – et la fin de la parenthèse de l’étalement et du desserrement urbains régulièrement annoncée, l’affaire va-t-elle prendre fin faute de plaignants ? Et alors, viendra-t-il un jour où les lotissements bon marché des grandes couronnes périurbaines prendront le charme désuet des faubourgs hétéroclites de l’avant-dernier siècle, eux aussi si justement dénoncés en leur temps ?
L’histoire urbaine est riche de ces espaces de mutation qui adviennent d’abord dans la controverse et la stigmatisation (les quartiers industriels jadis, les grands ensembles naguère, le périurbain aujourd’hui) avant de rejoindre à la deuxième génération le stock patrimonial en perpétuelle transformation qui fait la ville et ses territoires. Mais si l’on a coutume de dire qu’en urbanisme les solutions d’aujourd’hui sont les problèmes de demain, il semble que la périurbanisation ne demeure, aux yeux de tous, que le problème d’aujourd’hui, sans guère de promesses pour demain.
C’est que, dans cette histoire urbaine, la question périurbaine dérange en ceci qu’elle interpelle un vieux couple épistémologique, classique des sciences de la société et de ses espaces, mais qui ne lui fait par définition guère de place : le couple ville / campagne. Il est entendu depuis longtemps, au moins en Europe, qu’on tient là les deux figures uniques de la matrice territoriale, celle qui fait de l’espace avec de la société, et vice-versa.