Rousseau enfants trouvés
5 tion de leur mère2 qu’il ne faut pas déshonorer. Vous connaissez ma situation; je gagne au jour la journée mon pain avec assez de peine; comment nourri- rais-je encore une famille? Et si j’étais contraint de recourir au métier d’auteur, comment les soucis domes- tiques et les tracas des enfants me laisseraient-ils, dans mon grenier, la tranquillité d’esprit nécessaire pour faire un travail lucratif? Les écrits que dicte la faim ne rapportent guère et cette ressource est bientôt épuisée. Il
10 faudrait donc recourir aux protections, à l’intrigue, au manège; briguer quelque vil emploi; le faire valoir par les moyens ordinaires, autrement il ne me nourrira pas , et me sera bientôt ôté; enfin, me livrer moi-même à toutes les infamies pour lesquelles je suis pénétré d’une si juste horreur. Nourrir, moi, mes enfants et leur mère, du sang des misérables! Non, madame, il vaut mieux qu’ils soient orphelins que d’avoir pour père un