Réel et fiction dans l'art
2 . « J’ai plâtré à moitié un paquet de cinquante exemplaires d’un recueil, le “Pense-Bête”. Le papier(...)
3 . Ibid.
2MOI AUSSI, JE ME SUIS DEMANDÉ SI JE NE POUVAIS PAS VENDRE QUELQUE CHOSE ET RÉUSSIR DANS LA VIE. Le carton d’invitation de la première exposition de Marcel Broodthaers en 1964, parle de commerce et d’inscription sociale, avant de déclarer l’artifice : L’IDÉE ENFIN D’INVENTER QUELQUE CHOSE D’INSINCÈRE ME TRAVERSA L’ESPRIT. Broodthaers donne le change. Il « abandonne » la poésie – laquelle ne nourrit pas son homme – et passe sur le terrain ennemi des arts plastiques en réifiant son dernier recueil, le Pense-Bête. Il plâtre quelques exemplaires invendus, dont il avait dans un premier temps obturé le texte avec des pavés de couleur, contre un globe d’un blanc douteux 2. Le geste est celui d’un bricoleur, mais Broodthaers immobilise la fluctuation de l’écriture, la transforme en chose. Aucun n’eut la curiosité du texte, ignorant s’il s’agissait de l’enterrement d’une prose, d’une poésie, de tristesse ou de plaisir. Aucun ne s’est ému de l’interdit. Jusqu’à ce moment, je vivais pratiquement isolé du point de vue de la communication, mon public étant fictif. Soudain il devint réel, à ce niveau où il est question d’espace et de conquête... 3
3Broodthaers a