Sade
Expérience mentale
Que se passe-t-il quand la passion domine sans autre frein que la variation de ses caprices, quand la raison n’est plus un principe de tempérance mais un simple instrument au service de la satisfaction du désir ? Le déchaînement de la passion produit un monde brutal : un monde de meurtres où nul n’est assuré de conserver longtemps sa vie ; un monde de solitude où chacun n’espère rien d’autre de ses semblables que l’accord ponctuel des intérêts ( voir la précision sur les associations de malfaiteurs que seul l’intérêt soude page 60, Justine ou les malheurs de la vertu.)
Ce monde fascine, mais il fait peur, dans une conférence où G. Bataille étudie la question du mal dans le platonisme et dans le sadisme, il précise : « Le déchaînement des passions est le bien qui a toujours su animer les hommes de la façon la plus meurtrière ». Et il sait gré au Marquis de Sade d’avoir osé sauter le pas de la morale traditionnelle en campant un monde où seul domine le principe de plaisir sans gendarme et sans loi. En ce sens il faut lire les œuvres de Sade comme des expériences mentales.
Mise en garde
Les scènes pornographiques que décrit Sade sont d’une monotonie affligeante ; le lecteur qui cherche l’excitation trouvera infiniment plus de variété et d’imagination dans le moindre album du Scarabée d’Or. Fondamentalement Sade n’est pas un écrivain érotique.
Sade ne cherche pas le plaisir du lecteur. Il martèle une anti-morale. Dès lors la répétition entre dans un projet historique : elle est œuvre de propagande.
L’œuvre de Sade est philosophique et politique. Elle opère un renversement de toutes les règles morales traditionnelles : la calomnie, le vol, le meurtre et les pires débauches de cruauté y sont loués comme étant à la fois conformes à la nature et propres à former un peuple respecté de ses ennemis.
Pour avoir une vue d’ensemble de ce système de pensée, nous vous recommandons la lecture du cinquième dialogue de la