Sociologie du travail
Les politiques de gestion des compétences promettaient de relancer l'ascenseur social dans les entreprises. Elles n'ont pas tenu leurs promesses.
Bien malmenée à l’ère de la flexibilité, la perspective d’une « carrière maison » a été ravivée au cours des dernières années par la « logique compétence » implantée dans de nombreuses entreprises. Le deal que les managers proposent aux salariés peu qualifiés est en substance le suivant : acquérez les compétences dont l’entreprise a besoin et vous gravirez les échelons. La logique compétence a-t-elle rempli ses promesses ? La sociologue Sylvie Monchatre a enquêté dans la sidérurgie et l’hôtellerie.
Formation plutôt que promotion
La promesse de relancer les « carrières ouvrières » avait été l’un des arguments avancés lors de la négociation de l’accord Acap 2000 qui instituait la logique compétence dans la sidérurgie. Alors que l’organisation du travail répartissait les ouvriers en postes de travail, prévoyant une règle d’avancement à l’ancienneté, ce mode de promotion s’est grippé dans les années 1990. La logique compétence proposait un changement de fond en comble. Désormais les ouvriers seraient incités à acquérir une pluralité de compétences, leur permettant d’alterner entre plusieurs postes de travail. Polyvalents et concernés par les objectifs de l’entreprise, les salariés qui joueraient le jeu verraient leurs chances de promotion s’accroître à mesure que leur supérieur noircirait les cases des grilles de compétences à acquérir. Dix ans après l’accord, S. Monchatre a cependant constaté que les promotions peinaient à se matérialiser. En effet, la nouvelle organisation du travail est divisée en une pluralité d’étages plutôt étanches. Si la fonction d’opérateur comporte plusieurs échelons à gravir, il est rare de devenir ensuite agent de maîtrise ou technicien : l’entreprise préfère recruter à ces stades des jeunes, détenteurs d’un BTS. Les opérateurs en tirent