Sociologie
2C’est cet écart et la perte analytique qu’elle entraîne qui se trouve à l’origine de cet article. Pour le comprendre, il va nous falloir évoquer dans un premier moment la très forte convergence entre le regard romanesque et la sociologie naissante, avant de signaler les raisons de leur éloignement depuis quelques décennies. Attachés à la vision du personnage social traditionnel, à la description des situations par le biais de la notion de rôle et à la temporalité causale de l’intrigue, les sociologues n’ont pas su prendre acte de la richesse présente dans les développements ultérieurs du roman. Ce sera en nous centrant sur ces trois dimensions que nous nous efforcerons de montrer les possibilités que la lecture analytique des romans renferme pour l’imagination sociologique.
Retour sur une idylle analytique
3C’est donc la très grande proximité analytique entre le réalisme littéraire et le projet sociologique naissant qu’il nous faut souligner tout d’abord (Lepenies, 1990). L’âge d’or du roman social fait pendant aux débuts de la pensée sociologique, même si celle-ci ne trouvera son expression canonique que des décennies plus tard. Au-delà de leurs différences, discours sociologique et réalisme littéraire se sont en quelque sorte réciproquement aimantés et, ce faisant, ont pu cristalliser un mode très voisin de description et d’analyse. Ils ont tous