Soleil couchant
Texte étudié :
Soleils couchants
Le soleil s'est couché ce soir dans les nuées;
Demain viendra l'orage, et le soir, et la nuit ;
Puis l'aube, et ses clartés de vapeurs obstruées ;
Puis les nuits, puis les jours, pas du temps qui s'enfuit !
Tous ces jours passeront ; ils passeront en foule
Sur la face des mers, sur la face des monts,
Sur les fleuves d'argent, sur les forêts où roule
Comme un hymne confus des morts que nous aimons.
Et la face des eaux, et le front des montagnes,
Ridés et non vieillis, et les bois toujours verts
S'iront rajeunissant ; le fleuve des campagnes
Prendra sans cesse aux monts le flot qu'il donne aux mers.
Mais moi, sous chaque jour courbant plus bas ma tête,
Je passe, et, refroidi sous ce soleil joyeux,
Je m'en irai bientôt, au milieu de la fête,
Sans que rien manque au monde immense et radieux !
Victor HUGO, Les Feuilles d'automne.
Commentaire du texte :
Recueil poétique de Victor Hugo (1802-1885), Les Feuilles d’automne fut publié à Paris en 1831. Dominés par la mélancolie, se présentant bien comme des feuilles dispersées, les quarante poèmes réunis sous un titre rappelant l’une des plus célèbres Élégies de Millevoye paraissent après la luxuriance des Orientales, et après la consécration du chef de l’école romantique, avec les flamboyances d’Hernani et de Notre-Dame de Paris. Ce virage apparent révèle en réalité une tendance hugolienne profonde. Composées entre juillet 1828 et novembre 1831, ces pièces assument les coups et les peines de la vie privée (en 1828, Hugo a perdu ses parents, son premier-né et sa belle-mère, en 1830 la crise conjugale commence, la séparation physique intervient après la naissance d’Adèle en juillet), ainsi que ceux de la révolution de Juillet. Étape décisive, la trentième année, fin de la jeunesse, semble déjà l’automne de la vie. La poésie s’installe dans une nouvelle saison mentale.
Les exercices