« Son talent consiste principalement dans l'art d'attirer l'attention. il invente peu, mais il marque ce qu'il touche d'une empreinte ineffaçable. il ne dit que des vérités ordinaires mais une fois qu'il les a dites, on
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14 pages
La Bruyère, qui publie en 1688 sa seule et unique œuvre, Les Caractères, a souvent été caractérisé comme un auteur qui suivait le travail de ses prédécesseurs, tel un La Rochefoucauld ou encore Pascal. On a pu dès lors lire dans Les Caractères cette affirmation : « Horace ou Despréaux l'a dit avant vous. — Je le crois sur votre parole ; mais je l'ai dit comme mien ». D'après La Bruyère, l'écrivain se doit de reprendre ce qui a déjà été dit car il est capable de l'énoncer à sa manière et va même encore plus loin dans la question déjà traitée. Ce phénomène dans l'écriture est alors exploité par l'auteur pour aller au-delà d'une connaissance déjà établie. À la lecture de l'oeuvre, Hippolyte Taine pense avoir saisi la méthode de l'auteur et explique ceci : « Son talent consiste principalement dans l'art d'attirer l'attention. Il invente peu, mais il marque ce qu'il touche d'une empreinte ineffaçable. Il ne dit que des vérités ordinaires mais une fois qu'il les a dites, on ne les oublie plus. » Le syntagme nominal « le talent » nous place dans un contexte plus artistique, et qui dénote donc un public face à l'oeuvre que l'auteur présente. Ceci est renforcé par le reste de la phrase « l'art d'attirer l'attention » : cela signifie que l'artiste a un but précis en achevant son œuvre, et dans ce contexte, ce but est d'obtenir des vues sur l'oeuvre. On pourrait se demander sur quoi il attire l'attention, sur son style ou bien sur ses propos ? Aussi, H. Taine affirme que La Bruyère « invente peu », c'est-à-dire que le peu qu'il invente reste dans les esprits, ainsi on peut considérer que c'est sa propre production qui nous marque à vie. Par la suite, il emploie les termes de « vérités ordinaires » qui paraissent être assez réducteurs vis-à-vis des sujets traités par l'auteur. Il nuance à chaque phrase grâce à l'adversatif « mais » pour accentuer le fait que l'auteur parvient, tout en reprenant des idées connues, à captiver son lectorat.
Par rapport aux propos de H. Taine,