Spinoza
Spinoza, Traité théologico-politique, XX
Il est de tradition que la philosophie mette à la question le discours politique, quitte trop souvent à lui nier toute pertinence et à lui reprocher de n’être pas ce qu’en aucune manière il n’a à être, c’est-à-dire un discours du vrai. Au-delà de ce malentendu fondamental, dont la critique platonicienne des sophistes a sans doute été la matrice, il reste à interroger inlassablement la légitimité des pratiques discursives en politique, cela tout en reconnaissant au discours politique sa spécificité et sa nécessité.
Or c’est dans un rapport essentiel à la conflictualité inhérente à toute réalité sociale que se développe le discours politique, nécessairement soumis à des exigences d’efficacité, puisque le champ du politique est celui de la décision et de l’action. Mais tout énoncé politique doit pouvoir s’inscrire dans l’espace d’un débat public, faire l’objet de la critique et des controverses, donc d’une évaluation et d’une interprétation. En ce sens, tout énoncé politique doit engendrer en retour d’autres énoncés. De ce jeu croisé des énoncés dépend l’existence même de la République, qui ne saurait être qu’à la condition d’être à la fois l’objet et le lieu du débat politique. Rhétorique par excellence, un tel débat requiert l’acte permanent d’une intelligence herméneutique, à même justement d’en évaluer les excès éventuels ou les dérives ; il est bien entendu l’expression des conflits qui traversent le champ politique tout autant que la condition de leur résolution ou de leur redéfinition.
C’est aujourd’hui l’existence même du