thérèse raquin

1362 mots 6 pages
Un échange de lettres entre Sainte-Beuve et Émile Zola, à propos de « Thérèse Raquin »

La lettre de Sainte-Beuve à Émile Zola, le 10 juin 1868

Cher Monsieur,

Je ne sais si je vous enverrai cette lettre, car je ne me sens aucun droit de critique privée sur Thérèse Raquin, et il me faudra bien une troisième sommation pour que je vous obéisse.

Votre œuvre est remarquable, consciencieuse, et, à certains égards même, elle peut faire époque dans l’histoire du roman contemporain.
Selon moi, cependant, elle dépasse les limites, elle sort des conditions de l’art à quelque point de vue qu’on l’envisage ; et, en réduisant l’art à n’être que la seule et simple vérité, elle me paraît hors de cette vérité.

Et tout d’abord, vous prenez une épigraphe que rien ne justifie dans le roman. Si le vice et la vertu ne sont que des produits comme le vitriol et le sucre, il s’ensuivrait qu’un crime expliqué et motivé comme celui que vous exposez n’est pas chose si miraculeuse et si monstrueuse, et on se demande dès lors pourquoi tout cet appareil de remords qui n’est qu’une transformation et une transposition du remords moral ordinaire, du remords chrétien, et une sorte d’enfer retourné.

Dès les premières pages, vous décrivez le passage du Pont-Neuf : je connais ce passage autant que personne et par toutes les raisons qu’un jeune homme a pu avoir d’y rôder. Eh bien ! ce n’est pas vrai, c’est fantastique de description : c’est comme la rue Soli, de Balzac. Le passage est plat, banal, laid, surtout étroit, mais il n’a pas toute cette noirceur profonde et ces teintes à la Rembrandt que vous lui prêtez. C’est là une manière aussi d’être infidèle.

Vos personnages d’ailleurs, si vous les avez faits exprès plats et vulgaires (excepté la jeune femme qui a quelque chose d’algérien) sont ressemblants, bien présentés, analysés en conscience, copiés avec probité. A vrai dire, si peu idéaliste que je sois, je me demande bien si le crayon ou la plume ont nécessairement pour

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