Tiers-monde et tiers-mondisme
Tiers-monde et tiers-mondisme: Émergence d’un mouvement et contexte sociohistorique
Parfois écrit avec des majuscules, des minuscules ou au pluriel, le mot tiers-monde a aujourd’hui 60 ans (Liauzu, 2003). 1952 : l’expression tiers-monde apparait pour la première fois sous la plume d’Alfred Sauvy dans L’Observateur. Démographe français, il utilisa ce terme pour désigner les pays « n’appartenant pas au bloc occidental [capitaliste] ou au bloc de l’Est », et généralement, colonisés ou nouvellement décolonisés (Liauzu, 2003, 924). Ainsi, Sauvy établit par analogie avec le Tiers État français de l’Ancien Régime, « composé des classes subalternes et incluant des groupes sociaux hétérogènes qui ont peu d’intérêts communs, à part celui de s’opposer au clergé et à la noblesse », la notion de tiers-monde, composé de pays aux itinéraires contrastés et qui ont des profils économiques et sociopolitiques fort divergents (Schaefer et al., 2008, 4).
Dans le contexte géopolitique bipolaire de la guerre froide, la notion de tiers-monde, souvent associé au sous-développement, est graduellement utilisée pour « définir l’ensemble des pays pauvres à l’échelle mondiale et se réfèrent à une lecture du monde politique [sous-entendant] une opposition ou une résistance du tiers-monde aux deux superpuissances (Schaefer et al., 2008, 4). » Shohat (2007) avance que le projet tiers-mondiste se référait principalement aux mouvements anticoloniaux et de libération nationale des années 1950 aux années 1970, « ainsi qu’à l’analyse politico-économique des théories de la dépendance et du système-monde capitaliste (André Gunder Frank, Immanuel Wallerstein, Samir Amin). » Qui plus est, Hobsbawn (1999) souligne que pour le tiers-mondisme, l’émancipation de l’humanité se