Turquie
Benoît MONTABONE*
Nombreux sont les observateurs à s’interroger sur les évolutions possibles
des relations entre la Turquie et l’Union européenne (UE), et la question paraît d’autant plus cruciale qu’elle provoque facilement polémiques et prises de position passionnelles. Tout au long de son histoire, la Turquie, et avant elle l’Empire Ottoman, est apparue aux occidentaux comme un pays carrefour entre les pays balkaniques et les pays du Moyen Orient, entre la Méditerranée et la Mer Noire, entre le monde romain et le monde turc, en résumé comme un « monde de l’entredeux ». Profitant de cette position stratégique, la Turquie a clairement choisi au cours de la guerre froide le camp occidental contre les visées russes sur le Bosphore et les Dardanelles, en devenant un des piliers de l’OTAN. Ses excellentes relations avec Israël lui confèrent aussi ce statut atypique de seul pays musulman à soutenir la politique de l’Etat hébreux. Aux yeux des européens, la Turquie possède aujourd’hui d’autres atouts non négligeables: une économie dynamique et prometteuse, une population jeune, une main d’oeuvre qualifiée et moins chère qu’en Europe communautaire. Cela en fait un acteur incontournable dans les stratégies politiques et économiques de l’Union européenne. Lorsqu’on observe, par exemple, l’évolution du dossier pétrolier et en particulier la question du tracé du nouvel oléoduc qui doit évacuer le pétrole azerbaïdjanais, on s’aperçoit que la solution choisie qui est soutenue par les occidentaux, consiste à passer par l’Azerbaïdjan, la Géorgie, l’Anatolie et le port turc de Ceyhan où arrive déjà l’oléoduc de Kirkuk. Une telle option renforce les atouts stratégiques de la Turquie car ce nouveau complexe pétrolier constituera dans les prochaines années un pôle important d’approvisionnement pour la planète entière1. La question de l’intégration européenne de la Turquie