Un nouveau modèle de société civile
Columbia University
et Andrew Arato
Ce texte correspond à l'introduction du livre "Civil Society and Political Theory", publié aux presse du MIT, en 1992. Avec la permission des auteurs nous en reproduisons ici l'intégralité, telle que traduit par Marie Ploux, et publié dans le numéro 564 (juillet 1993) de la revue Temps Modernes. Les NOTES, nombreuses dans le texte original, ont été omises par la traduction.
Nous sommes à la veille d'une profonde et radicale modification de notre compréhension des sociétés modernes. Celle-ci a déjà été dénommée à partir de points de vue différents, mais les expressions ambigues de " société postindustrielle " et " société postmoderne " ne retiennent que le seul aspect positif des questions d'ordre économique et culturel. Or notre intérêt se porte vers le politique. De ce point de vue, ces termes forgés à l'aide de ce préfixe, qui implique un " après " ou un " au-delà ", ne décrivent qu'improprement les modifications intervenues dans l'ordre de la culture politique et des conflits sociaux. Il s'ensuit que, pour diverses raisons, empiriques et théoriques, les anciens modèles hégémoniques se sont désintégrés, en même temps que les certitudes et les garanties qui les accompagnaient. Nous sommes pris, depuis une vingtaine d'années, dans un mouvement de renouveau de la pens4e politique et sociale.
En réaction à l'effondrement des deux paradigmes dominants de la période antérieure - libéralisme et néomarxisme -, certains ont tenté d'insuffler une vie nouvelle à la théorie politique par une " réactivation du rôle de l'Etat ". Si cette approche a donné naissance à de fort intéressantes analyses théoriques et empiriques, la focalisation sur l'Etat n'a pas permis de prendre en compte la nouveauté du débat politique ou des enjeux de la lutte sociale. Cet intérêt exclusif pour l'Etat agit comme antidote au fonctionnalisme réducteur de nombreux modèles néo-marxiens et libéraux,