«Un verre chez moi ? le lit, tu connais...»
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Révélateur du phénomène, le film de fin d'étude de Sofie Peeters, Femme de la rue, qui a fait le buz tout l'été dans les médias et chez les internautes. Rappelons vite que la jeune Belge, délurée mais pas provocation, y compilait les réactions d'hommes plutôt gratinées sur son passage (de «Chienne» à «Un verre chez moi à la maison, bien sûr pas dans un café, l'hôtel, le lit, tu connais...»), dans un quartier populaire de Bruxelles. Stupeur et tremblements : on croit découvrir le harcèlement de rue, primaire, arriéré, dans une grande ville européenne. Mais est-ce vraiment nouveau ? «Il est revenu avec une forme nouvelle», selon la psychologue Maryse Vaillant, auteure cette année de l'essai Sexy soit-elle (Ed. Les Liens qui libèrent). 'Dans les années 60-70, dès qu'une fille était pubère, elle se faisait siffler, en particulier par les ouvriers de chantier. On y entendait une sorte d'hommage populaire. Aujourd'hui, c'est devenu plus agressif.' Il y a des situations, même anodines, qui surexposent. 'Je ne peux plus boire un Coca à la paille ou manger une banane dans la rue, sans me prendre une réflexion ou entendre un bruit de succion,' déplore Géraldine. Maïa Mazaurette, auteure d'un blog à succès (Sexactu) et d'un premier roman, La coureuse (éd. Kero), alerte aussi sur 'la pratique du jogging. Un vecteur terrible. Tu es suante, pas à ton avantage, et pourtant, il y a toujours un crétin pour te coacher :« Vas-y, plus vite! », ou « Remue tes fesses ! »' Un peu, ça va. Mais c'est la répétition, le systématisme, qui épuisent. Anne (la fille à vélo) en témoigne : 'Bien sûr, il y a une petite voix qui nous dit qu'un jour, peut-être bientôt, on ne nous sifflera plus. Que c'est encore un signe de désir. Mais le sentiment qui domine, c'est un mix de colère et d'humiliation. Je trouve inadmissible en 2012 de ne pas pouvoir marcher où je veux, habillée comme je veux.' Maryse Vaillant prolonge: 'Les jeunes femmes modernes se trouvent au cœur d'un paradoxe. La société ne cesse