Une activité inutile est-elle pour autant sans valeur ?
[Introduction]
Nous marchons pour rejoindre tel endroit, nous travaillons pour gagner notre vie, nous faisons du sport pour entretenir notre forme. Il n’y a point d’activité qui ne soit orientée vers un but déterminé. Tous les hommes s’affairent, s’activent, produisent des richesses et des biens. Nul doute que l’ensemble des activités humaines ait une utilité, et c’est cette utilité qui en fait la valeur. Il n’y a qu’à jeter un regard sur toutes ces constructions, ces œuvres humaines : leur évidente matérialité suffit à justifier et à valoriser les énergies et le travail qu’elles ont nécessités. Néanmoins, quand nous sommes fatigués de ce monde hyper actif, nous souhaitons le retrait, nous rêvons non à une passivité facile, mais à l’activité gratuite, dont le luxe est de n’être pas jugée à l’aune de son résultat. Il nous semble alors que par la lecture désintéressée, la balade improvisée, nous retournons aux « vraies valeurs » de l’existence.
Si bien que se demander si une activité inutile peut revêtir de la valeur nous plonge dans la perplexité. D’un côté, notre être social, sommé d’agir avec efficacité et rendement, ne comprend pas comment quelque chose d’inutile peut avoir une quelconque valeur. D’un autre côté pourtant, nous comprenons le sens profond d’une telle interrogation : il y a dans l’idée de valeur une richesse qui excède l’idée d’utilité, et même qui l’exclut.
D’où vient donc que l’activité inutile peut être jugée de manière aussi radicalement opposée ? Pourquoi l’utilité et la valeur sont-ils des concepts si proches qu’il est difficile d’envisager une activité inutile qui puisse avoir de la valeur ?
[1] – L’idée qu’une activité inutile puisse avoir de la valeur semble difficilement concevable…
Une première réponse, spontanée, discrédite l’intérêt même du sujet. Elle pourrait se formuler de la manière suivante : une activité inutile est évidemment sans valeur puisque toute