Valeurs temporelles et aspectuelles du présent
Malgré de régulières mises au point théoriques, le débat sur les valeurs et usages du présent est loin d’être clos. Pour se référer à ce temps, certains linguistes comme Guy Serbat parlent même d’un «temps caméléon» à cause de ses valeurs d’emplois particulièrement variées. En effet, le présent peut s’utiliser dans les trois époques temporelles, il peut englober toutes ces époques dans son emploi gnomique et il a la capacité de générer une époque temporelle inexistante dans ses emplois prototypants.
Parallèlement, d’un point de vue morphologique, le présent est construit sur son seul radical verbal et ses désinences de personnes, quand il y en a, sont attachées directement au radical ou par «une voyelle thématique». Cette simplicité le fait apparaître comme une forme simple (même si en réalité le radical subit des variations fréquentes), ce qui pousse certains linguistes à étiqueter la forme du présent comme «non-marquée» et parfois même à tirer des conséquences de ce postulat sur le signifié. Ainsi, il existe différentes manières d’appréhender le présent. Nous relèverons trois hypothèses importantes sur sa valeur temporelle: la déicticité, l’atemporalité et l’isochronie.
Déicticité
Qu’entend-on par un «présent déictique»? Cette théorique, soutenue par Benveniste, définit le présent comme une forme marquant la coïncidence entre le temps du déroulement du procès et le moment d’énonciation, à partir duquel est construite la valeur des autres temps. Cependant, la popularité de cette position classique est en déclin à cause des critiques qu’elle subit. De fait, cette explication est peu opératoire car elle ne rend compte que d’un usage très restreint du présent comme emploi canonique – finalement moins récurrent que ses emplois non-canoniques. Tous les emplois où le présent renvoie à d’autres moments que la situation d’énonciation sont alors expliqués par des effets stylistiques qui exploitent la vertu actualisante du