voyage au congo
Reviewed by
Arnaud Genon
Nottingham Trent University
Patrick Dubuis. Émergence de l'homosexualité dans la littérature française d'André Gide à Jean Genet. Paris: L'Harmattan, 2011. Pp. 317.
Ce n'est qu'à partir des années cinquante que la critique française a ouvertement abordé l'homosexualité des écrivains comme un élément « d'appréciation et d'analyse d'une œuvre » (10). Cela est d'autant plus paradoxal que la littérature homosexuelle est, en France, durant la première moitié du XXe siècle, l'une des plus importantes malgré la censure qui pèse. C'est à la fin du XIXe siècle que les écrivains de la Décadence tentèrent de briser le tabou lié à l'homosexualité. Mais le nombre croissant de romans dans lesquels la préoccupation homosexuelle se donnait à lire n'empêchait pas le mépris voire même la condamnation de ces œuvres sulfureuses par la majorité des intellectuels de l'époque. Le phénomène littéraire homosexuel est donc complexe et Patrick Dubuis tente de l'expliquer en s'appuyant sur des écrivains majeurs (Gide, Proust) mais aussi sur des auteurs plus discrets (Crevel, Sachs) ou oubliés (d'Axieros, Guersant).
Dubuis commence par évoquer les différents types d'homosexualités qui apparaissent dans la littérature de cette période. Il répertorie ainsi « les amitiés particulières entre adolescents » (25), souvent innocentes, que se vouent les collégiens, « la pédérastie sur le modèle antique » (30) dont se réclamait Gide par exemple. On trouve aussi « l'homosexuel 'femme manquée' » (32) que représente Charlus de La Recherche ou encore « l'homosexuel non efféminé » (35), figure rare n'offrant « pas une matière assez dense à exploiter » (36).
Les écrivains se sont d'autre part livrés à des tentatives d'explication quant aux causes de l'homosexualité. Dubuis distingue plusieurs conceptions : « l'homosexualité naturelle » (45) défendue, de manières différentes, par Gide, Cocteau ou Proust, ou l'homosexualité « pathologique »