Waterloo
L'élévation passe d'abord par les procédés habituels à l'épopée, un peu oubliée depuis les essais malheureux de Ronsard avec la Franciade, et que renouvelle Hugo. Le choix des alexandrins à rimes plates est propre à ce genre littéraire, car le vers long permet la gravité du ton. L'hyperbole abonde, avec l'image insistante du "gouffre" pour la plaine (v. 4, 5), les panaches "énormes " (v. 6), rimant avec les "blessures difformes " (v. 7), notation certes réaliste mais dont l'évocation dans ce contexte appartient également à l'exagération épique qui accentue aussi bien l'horreur que l'héroïsme, par le sourire (v. 22) des condamnés qui pousse jusqu'à l'exagération.
Les comparaisons et les métaphores concourent à donner de l'ampleur au combat : le choc de l'artillerie sur les troupes ressemble à un cataclysme naturel qui abat des murs entiers (v. 4) ou les moissons (v. 5). Le rejet du verbe "tombaient ", le choix pour illustrer cette chute des tambours-majors, qui sont les plus grands des soldats par leur taille rehaussée du panache, soulignent la brutalité du mouvement. Les murs expriment la solidité des troupes qui cèdent, les épis mûrs évoquent leur valeur, puisque la moisson est traditionnellement promesse d'opulence.
Avec cette dernière image Hugo retrouve le thème de la mort, souvent représentée depuis le Moyen Age comme une grande faucheuse. L'assimilation de l'armée française à la grandeur de l'armée romaine qui domina l'Europe entière est renforcée au vers 14 par la diérèse "lé/gi/on/naires". Ces incursions dans l'imaginaire de notre civilisation se prolongent avec l'assimilation de la plaine à un "gouffre flamboyant ", une "forge " (v. 3), une "fournaise " (v. 23) qui ne sont pas sans rapport avec la conception chrétienne de l'Enfer. La peinture, qui insiste sur le feu et la couleur "rouge " du cadre, renforce ces impressions visuelles dans le vers 3