Wild at heart de david lynch
UNE ANALYSE
À sa sortie de prison, Sailor Ripley décide de s’enfuir vers la Californie avec sa compagne, Lula. Ainsi débute Wild At Heart, une épopée qui s’inscrit dans une droite lignée de la mythologie américaine où figurent les grands espaces, la route, la liberté…
Le cinéaste David Lynch a mis en scène la mythique conquête de l’ouest sur le mode métaphorique dans plusieurs de ses oeuvres (Lost Highway, A Straight Story), mais toujours avec le regard particulier qui le caractérise, s’intéressant à la manière dont les mythes américains se sont figés en clichés et ne parviennent plus, comme à l’époque de l’après-guerre, à masquer les déroutes d’une Amérique glauque.
C’est donc à grand renfort d’ironie que nous est racontée cette quête d’amour et d’absolu qui se déroule dans un monde infernal[1], et qui puise abondamment dans les références du cinéma et de la culture populaire américaine. Toutefois, le mode ironique agit dans Wild At Heart comme un miroir déformant tantôt comique, tantôt effrayant, à travers lequel Lynch nous convie de plonger, à l’instar de ses personnages.
Dans cette analyse du film de David Lynch, nous tenterons de démontrer, notamment à l’aide de la théorie des cinq codes de Roland Barthes[2], comment le cinéaste déconstruit les mythes et les idéologies conventionnelles de la culture américaine, au lieu de les présenter comme issus d’un ordre universel.
SAUVAGERIE ET ÉTRANGETÉ
Wild At Heart s’ouvre sur l’embrasement spectaculaire d’un brasier qui envahit tout l’écran et submerge l’objet même qu’il dévore. On ne saurait négliger cet ardent générique, en particulier dans le cas de Lynch, qui met en scène le feu de façon récurrente dans ses films. Wild At Heart est en effet traversé sans cesse par le rougeoiement du feu. L’incandescence fonde ainsi le récit des (més)aventures de Sailor et Lula de maintes façons. On y verra bien sûr la première apparition des flammes qui causeront la