L'art de l'incipit chez aragon
Comparez ces trois incipit romanesques d'Aragon. Vous vous étudierez en particulier le croisement du narratif, du descriptif et du discursif dans la présentation du personnage féminin. Vous vous attacherez ensuite à définir la nature de la relation amoureuse dans ces trois passages.
Les trois textes (incipit) d’Aragon, écrits dans des contextes différents et éloignés, s’inscrivent dans un code romanesque précis, celui d’une relation amoureuse entre un homme et une femme. Le romancier y dépeint les actants en les bousculant à chaud devant les yeux des lecteurs. C’est une façon d’accrocher même les plus inhabitués à la lecture des romans.
1) Aurélien, (1944)
La première fois qu’Aurélien vit Bérénice, il la trouva franchement laide. Elle lui déplut, enfin. Il n’aima pas comment elle était habillée. Une étoffe qu’il n’aurait pas choisie. Il avait des idées sur les étoffes. Une étoffe qu’il avait vue sur plusieurs femmes. Cela lui fit mal augurer de celle-ci qui portait un nom de princesse d’Orient sans avoir l’air de se considérer dans l’obligation d’avoir du goût. Ses cheveux étaient ternes ce jour-là, mal tenus. Les cheveux coupés, ça demande des soins constants. Aurélien n’aurait pas pu dire si elle était blonde ou brune. Il l’avait mal regardée. Il lui en demeurait une impression vague, générale, d’ennui et d’irritation. Il se demanda même pourquoi. C’était disproportionné. Plutôt petite, pâle, je crois…Qu’elle se fût appelée Jeanne ou Marie, il y aurait pas repensé après coup. Mais Bérénice. Drôle de Superstition. Voilà bien ce qui l’irritait.
Schéma actanciel : Aurélien, Bérénice
Le narrateur marque sa présence en utilisant des outils de subjectivité telles que : n’aurait pas choisie , Les cheveux coupés, ça demande des soins constants , n’aurait pas pu dire , je crois… , Drôle de Superstition ,Voilà bien.
Ces éléments montrent que Aragon a un esprit de soutien à son lecteur comme s’il lui dit : « Lis,