L'enfant , jules vallès
Ex-gosses rossés qui n'avez pas été nourris au lait de la tendresse, ce livre est pour vous. Heureux chérubins qui avez échappé à l'enfer, ce livre est pour vous. ‘’L'enfant’’ raconte les misères du jeune Jacques Vingtras, alias Jules Vallès. Un Petit Chose qui fut fouetté de bonne heure. En guise de mère, une Folcoche qui a la torgnole et l'humiliation faciles. Le père? Un pion agrégatif froid comme la mort. Bien avant Gide, Vallès lança en 1878 son « Famille, je vous hais » et se met en scène, ancêtre oublié de l'auto-fiction. Une littérature d'ex-môme qui a morflé et qui écrit comme on appuie sur ses bleus, pour savoir si ça fait ma Le gosse ne pardonne pas.
Mais Vallès n'est pas une pleureuse. Cosette peut-être, mais Guignol d'abord. Il fut donc l'ahuri de service, qui n'en loupe pas une. Rires assurés quand, vêtu en charbonnier pour une fête, il se retrouve par erreur expédié à la plonge pour la nuit : au petit matin, sa mère, venue le chercher se refuse à le reconnaître : « J'étais orphelin », s' exclame-t-il soulagé. Mais, en voyant sur son derrière « certaine place couturée et violacée », elle s'écria : « C'est mon fils ! » Vallès, qui se contrefiche du ridicule, se déculotte comme jamais en littérature française. Et signe le livre le plus hilarant du XIXe siècle. La voix de l'enfant permettant tout, il se l'approprie avec génie. Tous les infortunés qui ont dû un jour enfiler un beau pantalon qui gratte boiront avec Vallès du petit-lait. Mme Vingtras a encore frappé : redingote rêche avec boutons en noyaux d'olive. L'ironie mord : « Ta mère t'aime et veut te le prouver. Te figures-tu qu'elle te laissera entrer dans ta redingote sans ajouter un grain de beauté, une mouche, un pompon? Tu ne connais pas ta mère, Jacques. » Des sous-pieds sont ajoutés, qui craquent devant toute la société, et voilà le vilain