L'ethique protestante et l'esprit du capitalisme
1 Max Weber, L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme,traduit par Isabelle Kalinowski, Flamma (...)
1Dans L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme, les premiers « entrepreneurs » capitalistes décrits par Max Weber combinent deux fonctions qui peuvent par la suite se trouver partiellement dissociées dans le développement du capitalisme : la propriété du capital et la direction de la production 1. C’est une logique financière, celle de l’augmentation constante du capital, qui prédomine. L’entrepreneur puritain dont Weber construit l’idéaltype réinvestit son capital au lieu de le consommer : c’est là ce qui le distingue du « riche » ou du simple « bourgeois » fortuné, avides de luxe et de dépenses somptuaires. Il produit « toujours plus d’argent » parce que la jouissance de ce dernier est indéfiniment différée (c’est la « contrainte ascétique d’épargne »). Le capitalisme moderne induit ainsi d’emblée une subordination de la production à un objectif financier : la multiplication du capital.
2 Pourtant, Weber affirme fortement, dans le même temps, que le capitalisme moderne (qu’il appelle « rationnel ») ne se confond pas avec le capitalisme financier des « spéculateurs » et des « aventuriers » (qu’il appelle « irrationnel »). Les termes « rationnel » et « irrationnel » prêtent à confusion : ils ne signifient pas que Weber jugeait « rationnel » le capitalisme moderne mais qu’il distinguait deux types de capitalisme dont l’un (celui qu’il définit dans L’Éthique protestante) était un capitalisme rationalisé, organisé en vue d’une maximisation et d’une pérennisation des profits que l’autre ne pouvait obtenir que de manière ponctuelle et contingente (et donc « irrationnelle » : à l’occasion d’une guerre, par exemple). Pourquoi Weber opérait-il cette distinction, alors qu’il soulignait par ailleurs l’importance de la logique financière du capitalisme moderne ? C’est que, selon lui, la spécificité du capitalisme « rationnel »,