L'humanitaire en question
LETTRE
N°72 Novembre - Décembre 2007 2 Euros
Histoires . Cultures . Confrontations . Coopérations
EDITORIAL
L
L’humanitaire en question porte la responsabilité ne permet ni la reconnaissance mutuelle du savoir de chacun, ni le respect de ses valeurs. Pourtant toute réflexion sur le sujet était jusque là considérée par les bailleurs de l’aide internationale, sinon suspecte, sans grand intérêt puisqu’elle ne relevait pas de « l’agir ». Les Occidentaux, habitués à la passivité des populations, ont continué à se comporter comme s’ils savaient définitivement et universellement quel était le bien pour tous. Plus mobilisés par une logique de survie que par une dynamique de construction attendue surtout d’un Ailleurs fantasmé, les Africains les ont laissé faire moyennant quelques avantages. Ce qui devait arriver, arriva. La triste affaire de l’arche de Zoé n’est pas un cas d’exception. Elle témoigne d’un profond dysfonctionnement qui de glissement en glissement s’est lentement installée. Les « humanitaires » impliqués n’étaient certainement ni meilleurs ni plus mauvais que d’autres. Ils sont juste allés un peu trop loin dans leur volonté de faire le bien des enfants, comme si leurs familles n’existaient pas, comme s’ils n’étaient reliés à aucun groupe social et culturel. Il sont juste allés un peu trop loin en tentant de les emmener dans un pays qui par ailleurs leur refuse le droit d’y vivre en famille, en considérant que leur noble cause leur conférait tous les droits, même celui du rapt organisé. La riposte est arrivée comme un boomerang. Fortes de notre exemple, les autorités et l’opinion tchadienne ont dénoncé l’action avec nos arguments renvoyés en miroir. Tout y passe. A notre tour d’être considérés comme des barbares capables de découper les enfants pour les dons d’organe, d’acheter des petits pour combler le vide de nos vies solitaires, de les séparer de leurs mères pour les ancrer dans des filiations non biologiques donc illégitimes.1 A notre