L'icendie mohammed dib
Cette thèse ébauche la description d'un fonctionnement littéraire dans sa spatialité: l'espace, pour tout pays anciennement colonisé, n'a-t-il pas plus qu'ailleurs signification historique? Il s'agit ici d'espace référentiel, certes: le pays, la culture, l'identité. Mais surtout d'espace de la communication littéraire et idéologique: nommer la spatialité que sous-entend toute esthétique de la réception, et ce, à partir d'une étude approfondie du fonctionnement narratif, mène donc à gauchir cette esthétique de la réception vers une sémiologie idéologique des lieux d'énonciation. La dépendance ne tient pas tant à l'usage de telle langue nationale (pourtant déterminant), qu'à la reproduction de modes de récit ou de modèles métaphoriques non maîtrisés. Le dire fondateur, émancipé, sera au contraire celui de textes de plus en plus nombreux qui, assumant et multipliant l'ambiguïté, tant du lieu que du sens, transforment leur propre signifiant en lieu même du désir comme de la productivité d'une écriture. Exhibant l'opacité ou le carnaval de leur écriture contre la transparence illusoire d'un dire dont le sens se lit par rapport à un lieu autre, les meilleurs romans algériens produisent, dans le corps-espace même de leur texte, un lieu-matrice de récits fondateurs. Et cependant ce lieu que vise le texte, et sans la visée duquel l'oeuvre qui le quête ne serait point, n'est-il pas avant tout le non-lieu même de son propre désir-écriture? C'est pourquoi, si l'idéologie leur demande de nommer le lieu de l'identité à créer, comment ces textes le pourraient-ils s'ils ne commençaient par se dire eux-mêmes comme lieux du dire - et manifester du même coup l'absence du lieu, sur laquelle ils fondent leur entreprise de localisation: se dire d'abord, car d'où nommerait-on, sinon, le lieu de l'être comme du dire? Une première partie montre quelques-uns des principaux facteurs de constitution de l'horizon d'attente par rapport auquel