L'utopie
l On reconnaît le nom grec topos qui signifi e « lieu ». Le préfixe
« u » peut renvoyer à deux préfi xes grecs : le préfi xe privatif ou, dans ce cas « utopie » désigne un non-lieu, ou le préfixe eu et, dans ce cas, le mot désigne un lieu heureux.
L’association des deux sens permet de défi nir ainsi l’utopie comme un monde idéal et heureux dans un non-lieu, c’est-à-dire qui ne saurait exister.
L’utopie est un récit qui suit des règles précises.
Son action se situe dans un lieu clos sur lui-même et isolé du monde, souvent une île ou un lieu inaccessible (les montagnes où se cache l’Eldorado de Candide).
Cette clôture du lieu permet de mettre en scène un monde autonome qui, privé du contact avec notre monde, a développé sa propre organisation, ses propres valeurs et ses propres règles.
L’utopie donne donc à voir un monde miniature, comme dans une bulle, qui mime le monde réel mais avec une différence fondamentale : il inverse nos règles pour mieux en démontrer l’inanité.
L’utopie présente un double visage : elle propose et expérimente un monde meilleur, mais dans le miroir qu’elle tend, le lecteur y voit aussi la critique de son propre monde. Sa fonction est donc avant tout critique.
Même si des utopies ont été écrites avant le XVIe siècle, on peut dire que c’est Thomas More qui fonde le genre en écrivant, en 1516, L’Utopie. Du XVIe au XVIIIe siècle, les écrivains (Rabelais,
Montesquieu, Voltaire...) qui pratiquent l’utopie tendent à démontrer qu’il peut exister une organisation sociale autre, bénéfi que à l’homme et dont celui-ci ferait bien de s’inspirer s’il veut réformer son propre monde. Le passage par le littéraire permet ainsi une réfl exion philosophique et