L'évolution du statut de l'image dans les pratiques pédagogiques
Je traiterai le thème qui m’a été proposé en abordant, dans une première partie, les métamorphoses et les paradoxes de l’image dans l’acte pédagogique ; puis, dans une deuxième partie, les enjeux de la formation à l’image aujourd’hui. Les métamorphoses et les paradoxes de l’image dans l’acte pédagogique.
L’image comme ennemie Je rappelle que l’image a d’abord été l’ennemie absolue du pédagogue. Platon considère que l’image est un obstacle à la pédagogie et que les philosophes ont vocation à conduire l’esprit au concept, à dégager l’individu des illusions et des apparences que représentent les images. Le mythe de la Caverne1est un mythe fondateur, à bien des égards, de l’éducation contemporaine. Encore aujourd’hui perdure cette méfiance quasiment viscérale qui fait que l’image est vécue comme obstacle à l‘accès au concept. Dans ce cadre, la seule image tolérable est l’image géométrique. Lorsque, dans son œuvre de jeunesse «le Ménon2», Platon fait dessiner des triangles au petit esclave, l’image géométrique est déjà un concept. Les professeurs de mathématiques le savent bien : quand ils tracent un triangle au tableau, ce n’est pas un triangle, c’est un concept de triangle, puisque le triangle tracé n’a pas les traits très réguliers, ni les angles bien ajustés… C’est l’idée de triangle qui est figurée abstraitement à travers la représentation iconique du triangle. Les didacticiens montrent d’ailleurs l’extraordinaire difficulté qu’ont certains élèves à comprendre ce qu’est le concept de triangle. Quand le professeur de géométrie dessine un triangle, il dessine une image dont il est important de se dégager, qu’il faut oublier immédiatement, qui n’est qu’un concept maladroitement figuré, concept qui lui-même doit donner lieu à une représentation mentale, qui elle-même doit donner lieu à une conceptualisation… c’est-à-dire qu’on doit arriver au bout du compte, à se donner la