La description de cet empire du crime est certainement l’une des originalités les plus fortes de M LE MAUDIT. Relativement peu préoccupé par les observations sociales, Lang avait mis en scène, jusqu'alors, des super-criminels "haut-de-gamme", des génies du mal dans le style de Fantomas ou de Fu-Manchu. Ici, par contre, les bandits sont pour le moins pittoresques, formant une population hétérogène de mères maquerelles, de vagabonds repoussants et de monte-en-l'air patibulaires. Le tribunal "populaire", instauré après la capture du Maudit, se compose ainsi d'une cour des miracle peu rassurante, très éloignée de l'idée qu'on se fait d'une assemblée de magistrats traditionnelle. Cette faune, sortie tout droit de "L'opéra de quat'sous" de Brecht, rappelle néanmoins, par certains aspects, d'autres organisations criminelles mises en scène par Lang : menée par un leader charismatique, très bien organisée (la bourse aux mendiants...), redoutablement efficace (la pègre va s'avérer au moins aussi véloce que la police), cette association de malfaiteurs est un véritable Etat dans l'Etat, capable de mettre en échec les pouvoirs officiels. Ici, toutefois, l'intérêt des forces du mal est de maintenir l'ordre social, indispensable à leur prospérité. Cette vision, paranoïaque, d'une société extrêmement fragile, dans laquelle le pouvoir légal ne l'emporte que de très peu, se retrouve aussi bien dans MABUSE LE JOUEUR que dans LES ESPIONS ou LE TESTAMENT DU DR. MABUSE. L'intérêt de Lang pour ces organisations criminelles surpuissantes trouve aussi des échos dans l'Allemagne des années 1920-30. L'Etat, affaibli par deux crises économiques dramatiques (en 1922, puis en 1929), pèse peu face à l'ascension du Parti Communiste et, surtout, du Parti Nazi.
Photo : M, LE MAUDIT
La police officielle de M LE MAUDIT tente aussi de résoudre cette affaire criminelle, mais ses premiers efforts aboutiront à des résultats malheureux. Des méthodes scientifiques, comme le recoupement d'empreintes