L'éducation Sentimentale
Frédéric et Madame Arnoux.

Il faisait frisquet mais la mer était calme pour un jour d'octobre. Une légère brise se levait et Marie tira sa longue écharpe à bandes violettes derrière son dos, s’assit sur le banc et sortit sa broderie de son panier à ouvrage. Il n'y avait personne sur le ponton du navire à part un jeune homme qu'elle avait aperçu ; adossé contre la balustrade du bateau. Tout le monde se préparait à dîner. Ce soir elle était invité avec son mari à la table du capitaine. Un privilège pas accordé à tout le monde, certes, mais elle appréhendait ce moment plus qu'autre chose.
Monsieur Arnoux et elle venaient de s'épouser il y a environ deux ans.
Vous savez parfois, il arrive, un jour, de croiser quelqu’un qui fait toute la différence et qui n'est pas comme les autres. On commence à avoir un peu d'espoir. Dans l’attente d’une lueur, d’un retour, on se sent bête quelque part, on sent que l’on perd notre temps en réalité car une personne ne semble pas être aussi affectée qu'un autre.
Voilà ce que Marie éprouvait depuis un bon bout de temps maintenant.
Son mari et elle étaient de retour des Antilles, là où se trouvait leur plantation. Grâce aux récoltes, son mari gagnait énormément d'argent ce qui leur permettait d'excellentes conditions de vie. Une vie de riche !
Trois fois par an, ils retournaient deux semaines à Paris où se trouvait leur première maison. Au départ, ils voyaient tous deux la vie en rose. Cette alchimie, ce sentiment indescriptible qui se nomme l'amour.
Mais l'amour dure rarement. Au fil du temps, elle voyait bien que cela diminuait... L'amour disparaissait, s'envolait discrètement tel une écharpe emportée par le vent.
Quand un jour, elle apprit qu'il avait une autre dame. Une maîtresse.
Depuis, elle s'était renfermée sur elle même. Elle ne voulait pas en parler. Non, il en était hors de question. En parler, serait de l'admettre ; tout le monde serait au courant et elle n'était pas prête de se débrouiller