Agir spontanément, est-ce agir librement ?
On peut douter qu’une action puisse être spontanée, ou douter que la liberté soit autre chose qu’un vague fantasme, mais la question se pose néanmoins de savoir si, dans l’hypothèse d’une action vraiment spontanée, elle équivaut à ce qui correspondrait à une action libre au cas où la notion de liberté aurait vraiment un sens. Le spontané est non réfléchi. Il semble irresponsable d’associer la liberté à l’absence de réflexion. Pourtant, tout n’est pas réfléchi dans la réflexion, il y a bien une forme d’existence antérieure à la réflexion et elle doit bien avoir un peu d’ouverture et de liberté si elle a pu mener ultérieurement à la réflexion. De même il doit bien y avoir quelque chose de libre et d’ouvert dans l’enfant qui peut mener à l’adulte. Si la liberté consiste à se posséder soi-même et non à être possédé, cette possession est-elle atteinte par la seule réflexion ou bien y a-t-il des éléments antérieurs à cette possession qui l’ont rendue possible et qui continuent de vivre en elle ? L’adulte n’est-il adulte qu’à la condition d’avoir complètement tué l’enfant qu’il était, et la naïveté est-elle toujours dénuée de profondeur, de sorte qu’on pourrait la confondre avec la simple niaiserie ou la simple crédulité imbécile ? La réflexion oblige à réfléchir sur les limites de la réflexion et à distinguer dans ce qu’on appelle spontané ce qui n’est qu’apparence de spontanéité et ce qui est spontanéité véritable. L’éloge de la spontanéité doit-il viser à discréditer la réflexion ou bien faut-il admettre une possible harmonie entre spontanéité et réflexion qui éviterait à la fois la niaiserie crédule et la prétention à la maîtrise totale ? Il est à la fois difficile de mettre toute la liberté dans la réflexion sans reconnaître que des facteurs non réfléchis ont eu un rôle positif favorisant la constitution de cette réflexion, et difficile de mettre toute la liberté dans une spontanéité irréfléchie car aucune