L’opinion ainsi acquise par l’auditoire ne pourra être que répétée et non argumentée. L’auditoire convaincu parce que séduit ne peut guère à son tour que séduire lui aussi s’il veut prolonger la chaîne de la conviction. La séduction fonctionne sur le principe de la contamination virale. Elle implique un certain mimétisme. Lionel Bellanger insiste sur le fait que le séducteur s’adapte aux circonstances, c’est-à-dire à l’auditoire : « le séducteur est celui qui fait ou dit au moment voulu ce qu’il faut : il fait preuve d’une totale obéissance à l’occasion… Le séducteur ressemble à tout ce qu’il approche. »
La séduction est bien un procédé de manipulation, qui s’écarte de l’argumentation proprement dite. Elle prive l’auditoire de la relation normale qu’il est en droit attendre de la part de l’homme politique en démocratie. Le recours aux techniques de séduction est hélas courant dans tous les domaines qui relèvent d’une anthropologie du convaincre. Elle est au coeur du harcèlement moral, mais aussi des techniques de communication enseignées dans le monde de l’entreprise comme la PNL (Programmation neuro linguistique), où la règle de base est dissimuler les procédés que l’on utilise.
Son emploi dans le champ de la publicité, qui fait de moins en moins appel à la rhétorique et à l’argumentation, au profit de l’esthétique de choc, est massif et bien connu. De nombreux messages publicitaires jouent à plein sur les mécanismes de la séduction. Le standard en la matière est le stimulus érotique, ou plus « soft », l’image agréable qui attirera le regard sur le produit. Le procédé est bien connu et il est inutile d’insister. Sauf qu’en général on en sous-estime les effets.
Tout se passe comme si l’acte destiné à convaincre était réduit à l’exorde, cette première partie du discours rhétorique qui vise précisément à capter la bienveillance de l’auditoire. De nombreux discours politiques aujourd’hui se réduisent à une excroissance monstrueuse de l’exorde, qui entoure et sature