Votre lettre m’a touché très sensiblement, et dans l’impossibilité d’aller à Paris de cinq ou six jours, je vous souhaite de tout mon cœur en repos et dans ce pays. J’y contribuerois de tout mon possible à faire passer votre chagrin, et je vous ferois assurément connoître que vous avez en moi une personne qui tâchera toujours à le dissiper, ou pour le moins à le partager. Ce qui fait que je vous souhaite encore davantage ici, c’est que dans cette douce révolution de l’année, après le plus terrible hiver que la France ait depuis long-temps senti, les beaux jours se goûtent mieux que jamais, et sont tout autrement beaux à la campagne qu’à la ville, où, quand vous les avez, il vous manque toujours des endroits pour en prendre tout le plaisir. Je me promène depuis le matin jusqu’au soir avec tant de satisfaction et de contentement d’esprit que je ne saurois croire m’en pouvoir lasser. En vérité, mon très cher ami, sans vous je ne songerois guère à Paris de long-temps, et je ne pourroisme résoudre à la retraite que lorsque le soleil fera la sienne. Toutes les beautés de la campagne ne vont faire que croître et embellir, surtout celles du vert, qui nous donnera des feuilles au premier jour et que nous commençons à trouver à redire depuis que le chaud se fait sentir. Ce ne sera pas néanmoins encore sitôt, et pour ce voyage il faudra se contenter de celui qui tapisse la terre, et qui, pour vous le dire un peu plus