Analyse de les bonnes
Les Bonnes est basé sur un fait divers réel : le crime des soeurs Papin. En 1933, Christine et Léa Papin, âgées de 28 et 21 ans, sont depuis 7 ans au service d'une famille bourgeoise du Mans où elles donnent tout satisfaction. En février, elles assassinent leurs patronnes, avec sauvagerie, leur arrachant les yeux, leur tailladant les cuisses et les fesses, puis aspergeant chaque victime du sang del'autre. Après quoi elles lavent les armes du crime ( un marteau, un couteau à découper et un pichet d'étain ). Elles se lavent elles-mêmes et se couchent dans le même lit.
En 1947, Les Bonnes sont le contraire d'un mélodrame sanglant. C'est un rite cérébral qui débouche sur le mythe et rejoint la tragédie. Madame ne meurt pas. Ce sont les Bonnes qui s'auto-détruisent. Chaque agression contre Madame est fantasmée ou avortée, et si elle devait mourir ce serait par le poison, la strangulation ou l'asphyxie, comme chez Racine.
Genet a par contre conservé l'homosexualité incestueuse des Bonnes. Dans la préface, Genet écrit: "Tous les soirs elles se masturbent et déchargent en vrac l'une dans l'autre leur haine l'une contre l'autre." Les soeurs haïssent Madame mais elles s'entre-déchirent tout autant et Claire a peur de Solange. L'unité d'action des Bonnes se résume d'un mot : "tuer Madame".
Il y a donc du classicisme dans cette composition. C'est à dire : Solange est incapable d'étrangler Madame, Claire est incapable de l'empoisonner et Claire force Solange à lui administrer le breuvage mortel. Le classicisme est renforcé par la construction en trois parties. Ces trois parties peuvent se subdiviser en cinq parties : * la première : du début de la pièce à la sonnerie du réveil qui ramène les Bonnes à la réalité après le jeu rituel * La deuxième : de la sonnerie du réveil à celle du téléphone qui signifie aux Bonnes que leur machination a échoué. * La troisième : de la sonnerie du téléphone à l'arrivée de Madame : préparation du meurtre