Analyse "le poison" de Baudelaire
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Le caractère unique et tragique des « bienfaits de la lune » tient dans cette construction d’un mythe fondateur du génie poétique, mais en même temps destructeur de ce génie. C’est la vaporisation du poète par le fantastique, son angoisse du tarissement, qui transparaît. Contrairement aux poèmes ironiques, la tonalité est ici presque pathétique, et le regard que Baudelaire jette sur sa propre œuvre a quelque chose de misérable, comme un poète diminuant le mérite de son œuvre pour en attribuer tout le génie à Dieu, et ici une divinité fantastique et terrifiante. Charles Baudelaire doit son génie à quelqu’un d’autre, à la Lune, à Berthe. La dédicace apparaît alors comme une signature, comme si la Muse « Berthe » était entièrement à l’origine du poème, que Baudelaire n’en était que le servile dépositaire, dont l’individualité a été vaporisé par le nombre, les poètes maudits.[...] Dans la troisième partie : La nuit et ses prestiges la Lune est présente dans plus de la moitié des textes. Dans Le clair de lune être maléfique, humanoïde et grotesque, elle tire la langue comme un pendu Le pouvoir démiurgique de la lune a une influence à la fois spatiale et temporelle. Influence spatiale, car sa parole, confondue avec sa pensée, trouve sa concrétisation immédiate dans l’action. Sa puissance qui ne souffre pas d’obstacle est mise en valeur par la conjonction de coordination logique et Mais cette conjonction est aussi révélatrice du pouvoir lunaire sur le temps, elle coordonne des passés simples et appose sur tout le paragraphe un rythme lancinant qui, malgré le nombre de verbes, semble maintenir l’action dans un passé hors du temps. [...]
[...] tu seras aimée de mes amants, courtisée par mes courtisans. Tu seras la reine des hommes aux yeux verts dont j'ai serré aussi la gorge dans mes caresses nocturnes; de ceux-là qui aiment la mer, la mer immense, tumultueuse et verte, l'eau informe et multiforme, le lieu où ils ne sont pas, la femme qu'ils ne connaissent pas, les