Analyse personnage charles bovary
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EN CHOISISSANT pour titre de son roman Madame Bovary, Flaubert a rejeté dans l’ombre celui qui avait pourtant donné son nom à la jeune Emma Rouault, le jour de son mariage : Charles Bovary, officier de santé à Tostes (Seine-Inférieure). Les célèbres états d’âme de sa femme, ses frasques adultères ont fait du malheureux le type même du faible, du cocu, de l’imbécile. La postérité ne lui passe rien, pas même son dernier mot, adressé à Rodolphe Boulanger après la mort tragique de celle-ci : « Je ne vous en veux pas. » Nul n’a jamais cherché à savoir si cette phrase était d’un saint ou d’un couard. Pour longtemps, Charles Bovary reste le collégien mal dégrossi chahuté par ses pairs aux cris de « Charbovari, charbovari ». Autant dire que l’essai qu’Antoine Billot lui consacre a tout du plaidoyer, pour ne pas dire du procès en réhabilitation. La cause n’est pas désespérée mais bien mal engagée. La littérature n’aime guère les médiocres. Ses yeux de Chimène, elle préfère les poser sur les forts caractères, héros flamboyants ou escrocs magnifiques, coureurs de dots, redresseurs de torts ou faillis de haut vol. Un démiurge amoureux Pourtant, dès que Billot déplace la caméra, rivée depuis 1856 sur la jolie peau blanche d’Emma, Charles Bovary s’anime. Le maladroit se délie, le benêt prend de la consistance. Un journal intime produit par Billot nous permet d’entrer dans le for de cet homme silencieux, souffrant mais fin observateur. Qu’un médecin ait le don du diagnostic n’est pas pour nous surprendre. Ainsi la soirée au château de la Vaubyessard, Bovary le diariste l’analyse avec hauteur. Il sait qu’il n’appartient pas au monde des danseurs. S’il a accepté de se rendre dans « la haute », c’est pour complaire à sa jeune femme dont il sent bien qu’elle se morfond à Tostes. Mais il sait parfaitement la raison de leur invitation en ces lieux. Leurs hôtes sont en fait des déclassés. Le duc de Laverdière ne se remet pas d’avoir été chassé de la pairie en 1830 et son gendre se