Anthologie poétique
Tétin refait, plus blanc qu'un œuf,
Tétin de satin blanc tout neuf,
Tétin, qui fais honte à la Rose,
Tétin plus beau que nulle chose,
Tétin dur, non pas Tétin, voire,
Mais petite boule d'ivoire,
Au milieu duquel est assise
Une Fraise, ou une Cerise,
Que nul ne voit, ne touche aussi,
Mais je gage qu'il est ainsi ;
Tétin donc au petit bout rouge,
Tétin, qui jamais ne se bouge,
Soit pour venir, soit pour aller,
Soit pour courir, soit pour baller :
Tétin gauche, Tétin mignon,
Toujours loin de son compagnon,
Tétin qui portes témoignage
Du demeurant du personnage,
Quand on te voit, il vient à maints
Une envie dedans les mains
De te tâter, de te tenir ;
Mais il se faut bien contenir
D'en approcher, bon gré ma vie,
Car il viendrait une autre envie.
O Tétin ni grand ni petit,
Tétin mûr, Tétin d'appétit,
Tétin, qui nuit et jour criez,
« Mariez-moi tôt, mariez ! »
Tétin, qui t'enfles, et repousses
Ton gorgerin de deux bons pouces,
A bon droit heureux on dira
Celui qui de lait t'emplira,
Faisant d'un Tétin de pucelle
Tétin de femme entière, et belle.
Clément Marot - Épigrammes (1535)
Je vous envoie un bouquet
Je vous envoie un bouquet que ma main
Vient de trier de ces fleurs épanies;
Qui ne les eût à ce vêpre cueillies
Chutes à terre elles fussent demain.
Cela vous soit un exemple certain
Que vos beautés bien qu'elles soient fleuries
En peu de temps cherront toutes flétries
Et comme fleurs périront tout soudain.
Le temps s'en va, le temps s'en va, ma Dame,
Las ! le temps non, mais nous, nous en allons,
Et tôt serons étendus sous la lame ;
Et des amours desquelles nous parlons,
Quand serons morts, n'en sera plus nouvelle;
Pour ce, aimez-moi cependant qu'êtes belle.
Pierre de Ronsard - Continuation des Amours (1555)
L’Andalouse
Avez-vous vu, dans Barcelone,
Une Andalouse au sein bruni ?
Pâle comme un beau soir d’automne !
C’est ma maîtresse, ma lionne !