Anthologie voyage
Un matin nous partons, le cerveau plein de flamme,
Le coeur gros de rancune et de désirs amers,
Et nous allons, suivant le rythme de la lame,
Berçant notre infini sur le fini des mers.
Mais les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent
Pour partir, coeurs légers, semblables aux ballons,
De leur fatalité jamais ils ne s’écartent,
Et sans savoir pourquoi, disent toujours : Allons !
Amer savoir, celui qu’on tire du voyage !
Le monde, monotone et petit, aujourd’hui,
Hier, demain, toujours, nous fait voir notre image :
Une oasis d’horreur dans un désert d’ennui !
Charles Baudelaire, Les fleurs du mal.
Charles Baudelaire : Charles Baudelaire est un poète et critique d'art Français. Né le 9 avril 1821 à Paris. Il fait ses études a Lyon puis au lycée Parisien Louis le Grand. C'est en 1842, de retour d'un voyage sur l'île Bourbon qu'il se met a écrire ses premiers textes. Il devient journaliste et critique d'art en 1844. Il est également traducteur. En 1857, suite a la publication des Fleurs du mal, son plus célèbre recueil de poèmes il fut attaqué en justice et condamné pour «offense à la morale religieuse» et «outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs». Il sombre dans la misère, la dépression et la maladie et meurt dix ans plus tard, en 1867 a Paris.
Brise marine.
La chair est triste, hélas! et j'ai lu tous les livres.
Fuir! là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres
D'être parmi l'écume inconnue et les cieux!
Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux
Ne retiendra ce coeur qui dans la mer se trempe
O nuits! ni la clarté déserte de ma lampe
Sur le vide papier que la blancheur défend
Et ni la jeune femme allaitant son enfant.
Je partirai! Steamer balançant ta mâture,
Lève l'ancre pour une exotique nature!
Un Ennui, désolé par les cruels espoirs,
Croit encore à l'adieu suprême des mouchoirs!
Et, peut-être, les mâts, invitant