Les Qanouns Kabyles ; Anthropologie juridique du groupement social villageois de Kabylie
Par Mustapha Gahloul, à l’édition L’Harmattan, Paris, 2011, pp. 218-220.
La défense de la Hurma de la cité 1. Qanouns et sacralité des lieux
Il se déduit aussi des développements précédents que la limite a une valeur juridique qui repose sur un principe fondamental qu’elle ne saurait éclipser, celui de la valeur sacrée qui lui est propre. Le respect de la propriété privée est intimement lié à la hurma, au caractère sacré du dieu. La limite sacrée est considérée comme telle parce que gardée par les Invisibles. Percer une maison ou renverser une haie ou une clôture est puni de la même amende dans certains qanouns. Aussi bien chez les Imceddaden oû : « quiconque est convaincu d’avoir percé le mur d’une maison ou renversé une haie, soit la nuit, soit le jour, paye 25 douros d’amende, et une indemnité de 25 douros au propriétaire, à titre de hurma ». Mais, si l’idéal de la limite, comme l’écrit M. Virolles-Souibes, est pour partie de rester infranchissable, toute limite forte ou faible, doit ménager les lieux pour son franchissement. Murailles, protections magiques, etc. viennent renforcer la valeur d’arrêt de la limite et manifester cette valeur ; elles organisent le franchissement contrôlé, relatif de la limite.
Chez les At Mengellat, chez les At El Ader et chez les At Frah celui qui enlève une borne qui limite sa propriété et celle du voisin, paye une amende. Il en est de même chez les At Wasif, chez les At Leksar, chez les At Mengellat pour celui qui arrache une haie, ou tout simplement à Agwni n’Teslent pour celui qui enlève du bois dans la haie d’une maison.
L’empiétement de terrain apparait bel et bien comme un délit, puisque les qanouns le sanctionnne d’une amende. Chez les At Mengellat, celui qui avance sa haie de manière à rétrécir le chemin ou, chez les At Wasif de manière à rétrécir un chemin communal, paye une amende. Une amende est infligée aussi chez les At