Arbitrage
Le Banquet, n°1, 1992.
Domaine politique - thème justice.
Par Jean-Hubert Moitry
Une amnistie votée pour les délits relatifs au financement des partis politiques, une justice frileuse dès lors qu'il s'agit de poursuivre la "haute" délinquance financière, des prisons surpeuplées avec leur lot de "bavures" et de mauvais traitements, une carrière médiocre pour la magistrature et un recrutement à son image, une indépendance qui ne survit que là où elle est inoffensive pour le pouvoir exécutif, des juges qualifiés de "bouffons de la République". Est-il encore nécessaire de s'étendre sur les malheurs de la justice?
Devant cette réalité indiscutable, on remarque un sentiment diffus de frustration de nos concitoyens à l'égard de la justice, dont ils se sentent dépossédés. De même, un mouvement grandissant de révolte et d'indignation gagne la magistrature. Alors, les juges et les justiciables contre l'administration et la classe politique?
On entend aujourd'hui les partis d'opposition réclamer à cor et à cri l'indépendance des parquets et de la justice par rapport aux pouvoirs exécutifs. L'alternance aurait-elle, une fois encore, le mérite de rappeler aux dirigeants d'hier la vertu salutaire de la séparation des pouvoirs? On ne peut que s'en féliciter. Mais à condition de s'engager dans une réflexion globale sur l'avenir de l'institution judiciaire, sur les conditions de son indépendance et sur la qualité de la justice. Pour répondre à ces vrais problèmes, la logorrhée et la mauvaise foi se partagent trop souvent le discours des partis politiques.
Un premier axe de réforme pourrait s'inspirer du principe de séparation des pouvoirs. Toute réforme contribuant à donner corps à ce principe à valeur constitutionnelle ne peut que bénéficier d'un large consensus dans l'opinion publique. En la matière, nous proposons un rééquilibrage des pouvoirs au sein de la justice, fondé sur une plus grande indépendance du budget de la