Argot
AU MILIEU DU XIX° SIÈCLE, L'ARGOT EST PRESCRIT DANS LE ROMAN D'UN GALÉRIEN. SURTOUT SI L'AUTEUR EN EST VICTOR HUGO, OBLIGÉ DE REVENIR SUR SA PROPRE INITIATIVE PAR LES OBJECTIONS QU'ELLE A RENCONTRÉES AUPRÈS DES UNS, PAR LES IMITATIONS QU'ELLE A SUSCITÉES DE LA PART DES AUTRES, LES MÊMES PARFOIS. CAR BALZAC EST CLAIREMENT VISÉ AU DÉBUT DU LIVRE INTITULÉ L'ARGOT:
Lorsqu'il y a trente-quatre ans le narrateur de cette grave et sombre histoire introduisait au milieu d'un ouvrage écrit dans le même but que celui-ci un voleur parlant argot, [note de l'auteur: Le dernier jour d'un Condamné] il y eut ébahissement et clameur. -Quoi! comment! l'argot? Mais l'argot est affreux! mais c'est la langue des chiourmes, des bagnes, des prisons, de tout ce que la société a de plus abominable! etc., etc., etc. Nous n'avons jamais compris ce genre d'objections. Depuis, deux puissants romanciers, dont l'un est un profond observateur du coeur humain, l'autre un intrépide ami du peuple, Balzac et Eugène Süe, ayant fait parler des bandits dans leur langue naturelle comme l'avait fait en 1828 l'auteur du Dernier jour d'un condamné, les mêmes réclamations se sont élevées.[1]
De fait, Hugo met ici le doigt sur l'une des plus apparentes contradictions de l'auteur de Splendeurs et misères des courtisanes. Il y commence le chapitre intitulé Essai philosophique, linguistique et littéraire sur l'argot, les filles et les voleurs[2] en déplorant à demi-mot que la littérature ait "employé l'argot avec tant de succès que plus d'un mot de cet étrange vocabulaire a passé sur les lèvres roses des jeunes femmes, a retenti sous les lambris dorés, a réjoui les princes dont plus d'un a pu s'avouer floué", pour ensuite truffer lui-même ses dialogues des termes de ce langage "dont l'affreuse poésie est indispensable dans cette partie du récit". Entre