Automne, vieillesse
Je regrette en pleurant les jours mal employés
À suivre une beauté passagère et muable,
Sans m’élever au ciel et laisser mémorable
Maint haut et digne exemple aux esprits dévoyés.
Toi qui dans ton pur sang nos méfaits as noyés,
Juge doux, bénin père et sauveur pitoyable,
Las ! Relève, ô Seigneur ! Un pécheur misérable
Par qui ces vrais soupirs au ciel sont envoyés. Si ma folle jeunesse a couru mainte année
Les fortunes d’amour, d’espoir abandonnée,
Qu’au port, en doux repos, j’accomplisse mes jours, Que je meure en moi-même, afin qu’en toi je vive,
Que j’abhorre le monde et que, par ton secours,
La prison soit brisée où mon âme est captive.
Desportes Philippe, Les Premières Œuvres, 1573.
Chanson d'Automne
Les sanglots longs
Des violons
De l'automne
Blessent mon cœur
D'une langueur
Monotone.
Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l'heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure;
Et je m'en vais
Au vent mauvais
Qui m'emporte
Deçà, delà
Pareil à la
Feuille morte.
Verlaine, Poèmes saturniens, 1866.
Heure d'automne
C'est bien mon deuil, le tien, ô l'automne dernière !
Râles que roule, au vent du nord, la sapinière,
Feuillaison d'or à terre et feuillaison de sang,
Sur des mousses d'orée ou des mares d'étang,
Pleurs des arbres, mes pleurs, mes pauvres pleurs de sang.
C'est bien mon deuil, le tien, ô l'automne dernière !
Secousses de colère et rages de crinière,
Buissons battus, mordus, hachés, buissons crevés,
Au double bord des longs chemins, sur les pavés,
Bras des buissons, mes bras, mes pauvres bras levés.
C'est bien mon deuil, le tien, ô l'automne dernière ?
Quelque chose, là-bas, broyé dans une ornière,
Qui grince immensément ses désespoirs ardus
Et qui se plaint, ainsi que des arbres tordus,
Cris des lointains, mes cris, mes pauvres cris perdus.
Verhaeren Emile, Les Débâcles, 1888.
Les Colchiques
Le pré est vénéneux mais joli en