Balzac : la femme de trente ans : chapitre 2

389 mots 2 pages
Texte étudié :

- Obéir à la société ?... reprit la marquise en laissant échapper un geste d'horreur. Hé ! monsieur, tous nos maux viennent de là. Dieu n'a pas fait une seule loi de malheur ; mais en se réunissant les hommes ont faussé son oeuvre. Nous sommes, nous femmes, plus maltraitées par la civilisation que nous ne le serions par la nature. La nature nous impose des peines physiques que vous n'avez pas adoucies, et la civilisation a développé des sentiments que vous trompez incessamment. La nature étouffe les êtres faibles, vous les condamnez à vivre pour les livrer à un constant malheur. Le mariage, institution sur laquelle s'appuie aujourd'hui la société, nous en fait sentir à nous seules tout le poids : pour l'homme la liberté, pour la femme des devoirs. Nous vous devons toute notre vie, vous ne nous devez de la vôtre que de rares instants. Enfin l'homme fait un choix là où nous nous soumettons aveuglément. Oh ! monsieur, à vous je puis tout dire. Hé bien, le mariage, tel qu'il se pratique aujourd'hui, me semble être une prostitution légale. De là sont nées mes souffrances. Mais moi seule parmi les malheureuses créatures si fatalement accouplées je dois garder le silence ! moi seule suis l'auteur du mal, j'ai voulu mon mariage.

Elle s'arrêta, versa des pleurs amers et resta silencieuse.

- Dans cette profonde misère, au milieu de cet océan de douleur, reprit-elle, j'avais trouvé quelques sables où je posais les pieds, ou je souffrais à mon aise ; un ouragan a tout emporté. Me voilà seule, sans appui, trop faible contre les orages.

- Nous ne sommes jamais faibles quand Dieu est avec nous, dit le prêtre. D'ailleurs, si vous n'avez pas d'affections à satisfaire ici-bas, n'y avez-vous pas des devoirs à remplir ?

- Toujours des devoirs ! s'écria-t-elle avec une sorte d'impatience. Mais où sont pour moi les sentiments qui nous donnent la force de les accomplir ? Monsieur, rien de rien ou rien pour rien est une des plus justes lois de la nature et

en relation

  • Andy Goldsworthy Before the mirror
    670 mots | 3 pages
  • Victor de l aveyron
    523 mots | 3 pages
  • Légalisation de la prostitution
    5282 mots | 22 pages
  • Le futur de nos enfants ?
    490 mots | 2 pages
  • Suffit-il d'avoir ce que l'on veut pour être heureux
    1074 mots | 5 pages
  • Spinoza ethique preface
    357 mots | 2 pages
  • Pour ou contre la vision libérale du coprs ?
    2343 mots | 10 pages
  • Odyssée
    491 mots | 2 pages
  • Dire à qqun soit naturel est-ce lui donner un bon conseil ?
    728 mots | 3 pages
  • Jugement de la prostitution
    580 mots | 3 pages
  • Rousseau
    490 mots | 2 pages
  • Doit on respecter la nature?
    1704 mots | 7 pages
  • Leibniz
    586 mots | 3 pages
  • De soi-même que ne peut-on attendre ?
    4743 mots | 19 pages
  • prostitution par pas moi
    731 mots | 3 pages