Belgique
Entre Flamands et Wallons, les fâcheries sont aussi vieilles que la Belgique. Et si les Belges y puisaient paradoxalement le secret d'une unité nationale inédite ?
A chaque jour suffit sa peine. Ce qui est vrai aujourd'hui en Belgique ne le sera plus demain. Négociations, arbitrages, claquements de portes, rumeurs d'abdication royale…
Depuis quatre mois, il faut un solide décodeur pour décrypter le feuilleton belge. Même les Français, pourtant experts dans l'imbroglio politico-administratif, y perdent leur latin. Quel pays, pourtant, pourrait tenir sans gouvernement depuis 120 jours ? Et quel orchestre jouer sans chef, sinon un peuple de musiciens roués à l'art subtil - et finalement complice - du compromis.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, quelques rappels s'imposent donc. En juin dernier, la victoire en Flandre du nationaliste Bart de Wever (Nouvelle Alliance flamande/N-VA) aux législatives relance la sempiternelle question de la partition du pays. Une vieille antienne, entonnée de plus belle depuis que la Flandre néerlandophone a repris du poil de la bête, il y a près de 40 ans.
Coquille vide
Résumons : jusqu'aux années 50, la Wallonie francophone tient la barre. Minoritaire certes, mais omnipotente. L'industrie lourde, la richesse, la langue dominante sont au sud. La distinction tient alors en un raccourci, proverbial et cruel : « Les Wallons ont la culture, les Flamands l'agriculture… ». Seul bémol, tous les chefs de gouvernement sont flamands. Mais généralement à la tête de coalitions sociales-chrétiennes-libérales qui, parvenues au pouvoir, mettent leurs revendications communautaires en sourdine.
Jusqu'aux années 80, la Belgique dispose donc encore d'un état central et unitaire. Plus pour longtemps. L'amertume flamande attend son heure. Depuis la guerre, du reste, elle n'a cessé d'enfler. Les violentes manifestations ouvrières de l'hiver 1960-1961, la scission de l'université de Louvain (voir page 6), le