Durant les années soixante, le Québec a été témoin d’une révolution qui est demeurée tranquille. C’est par la parole et le discours que les Québécois sont arrivés à faire cette révolution. C’est avec subtilité que Jean-Claude Lauzon présente cette époque, dans son film Léolo, en faisant parallèle aux épreuves de la vie d’un jeune montréalais qui s’évade constamment de la réalité qui l’entoure. Doté d’une famille largement dysfonctionnelle et aux bas moyens financiers, ce jeune garçon se voit perturbé du monde réel et se plonge dans des rêveries qu’il exécute par écrit. Tout au long du film, on aperçoit un Québec rêveur, qui est souligné à maintes reprises par le personnage principal, un rêve intouchable. Cette représentation est montrée dans le film lorsqu’il regarde la fleur sur sa table de chevet. Il voit l’image de celle-ci, son idée, sa nature, sa beauté. Il aperçoit une petite étiquette sur une des pétales et il lui suffirait d’un petit geste pour la décoller mais il refuse d’y toucher, de prendre sa place. << Parce que moi je rêve, moi je ne suis pas>>. Parce qu’il rêve, il n’est pas fou comme le restant de sa famille. Simultanément, à chaque fois que Léolo écrit, la scène suivante devient énormément lumineuse et une image de la Sicile ou de Bianca (sa voisine dont il fantasme) apparaît, laissant entendre une chanson italienne, le ramenant à son rêve qui est pour lui la réalité. Le film est formé principalement de gros plan et contient très peu de dialogue, laissant place à l’importante narration de Léolo. L’éclairage ainsi que les décors donne une atmosphère étrange et propice au rêve. Une des réalités du Québec de cette époque est aussi présentée par le personnage de Fernand, le frère aîné de Léolo. Dissimulé derrière ses gros muscles se trouvent un homme faible. Aucune image de lui ne peut remédier à la peur qu’il vit au fond de lui. Ce n’est pas une coïncidence que cette scène se produit avec les menaces d’un anglais car ça rappelle la crainte