Bodin
Les Six Livres de la République, Livre I, chap. I, VIII (extraits), éd. G. Mairet, L.G.F., Paris, 1993.
Livre I - Chapitre 1 (extraits)
Chapitre 1: Quelle est la fin principale de la République bien ordonnée
République est un droit gouvernement de plusieurs ménages, et de ce qui leur est commun, avec puissance souveraine. Nous mettons cette définition en premier lieu, parce qu’il faut chercher en toutes choses la fin principale, et puis après les moyens d’y parvenir. Or, la définition n’est autre chose que la fin du sujet qui se présente : et si elle n’est bien fondée, tout ce qui sera bâti sur [elle] se ruinera bientôt après. (…)
Nous avons dit en premier lieu, droit gouvernement, pour la différence qu’il y a entre les Républiques et les troupes des voleurs et pirates, avec lesquels on ne doit avoir part, ni commerce, ni alliance, comme il a toujours été gardé en toute République bien ordonnée. [. . . Les pirates] ne doivent jouir du droit de guerre commun à tous peuples, ni se prévaloir des lois que les vainqueurs donnent aux vaincus.
[L]es anciens appelaient République une société d’hommes assemblés, pour bien et heureusement vivre; laquelle définition toutefois a plus qu’il ne faut d’une part, et moins d’une autre, car les trois points principaux y manquent, c’est à savoir, la famille, la souveraineté, et ce qui est commun en une République; [et] aussi que ce mot, « heureusement », ainsi qu’ils entendaient, n’est point nécessaire (. . . ) Car la République peut être bien gouvernée, et sera néanmoins affligée de pauvreté, délaissée des amis, assiégée des ennemis, et comblée de plusieurs calamités (. . .).
Toutefois nous ne voulons pas aussi figurer une République en Idée sans effet, telle que Platon et Thomas le More Chancelier d’Angleterre ont imaginé, mais nous contenterons de suivre les règles Politiques au plus près qu’il sera possible (. . .)
Or, si la vraie félicité d’une République et d’un homme seul est tout un, et que