Boitelle Maupassant
BACCALAURÉAT PROFESSIONNEL
ÉPREUVE DE FRANÇAIS
Coefficient : 3 Durée : 2 H 30
TEXTE 1 : Guy de Maupassant, Boitelle (Extrait), (22 janvier 1889)
TEXTE 2 : Claude Levi-Strauss, Anthropologie Structurale II - Race et Histoire, (1973)
Document 1
Antoine présente à ses parents (un vieux couple de paysans normands) la jeune fille qu’il souhaite épouser. Cette jeune fille est noire.
Personne ne parlait. Antoine inquiet sifflotait un air de caserne, le père fouettait le bidet et la mère regardait de coin, en glissant des coups d’œil de fouine, la négresse dont le front et les pommettes reluisaient sous le soleil comme des chaussures bien cirées. Voulant rompre la glace, Antoine se retourna.
« Eh bien, dit-il, on ne cause pas ?
– Faut le temps », répondit la vieille.
Il reprit :
« Allons, raconte la p’tite l’histoire des huit oeufs de ta poule. »
C’était une farce célèbre dans la famille. Mais comme sa mère se taisait toujours, paralysée par l’émotion, il prit lui-même la parole et narra, en riant beaucoup, cette mémorable aventure. Le père, qui le savait par coeur, se dérida aux premiers mots ; sa femme bientôt suivit l’exemple, et la négresse elle-même, au passage le plus drôle, partit tout à coup d’un tel rire, d’un rire si bruyant, roulant, torrentiel, que le cheval excité fit un petit temps de galop.
La connaissance était faite. On causa.
A peine arrivés, quand tout le monde fut descendu, après qu’il eut conduit sa bonne amie dans la chambre pour ôter sa robe qu’elle aurait pu tacher en faisant un bon plat de sa façon destiné à prendre les vieux par le ventre, il attira ses parents devant la porte, et demanda, le coeur battant :
« Eh ben, quéque vous dites ? »
Le père se tut. La mère plus hardie déclara :
« Alle est trop noire ; non, vrai, c’est trop. J’en ai les sangs tournés.
– Vous vous y ferez,