Bourgeoisie francaise
Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot
La richesse s’oppose à la pauvreté dans tous les domaines et, aux extrémités de la société, il y a cumulativité des privilèges ou des handicaps. L’opulence se donne à voir, bien sûr, dans l’aisance matérielle et la valeur vénale du patrimoine, mais aussi dans les domaines scolaires, culturels, sociaux, dans la valeur symbolique de tous ces biens, matériels ou immatériels. La multidimensionnalité des patrimoines des grandes dynasties familiales de la noblesse et de la bourgeoisie constitue une base objective pour l’affirmation du groupe. Autrement dit la richesse dans ses différentes formes permet à la bourgeoisie d’être une classe en soi.
Dans une enquête, réalisée auprès de familles fortunées, de Paris à Bordeaux, en passant par Deauville et Biarritz, de la région parisienne avec Maisons-Laffitte et Le Vésinet, à Monaco et Saint-Jean-Cap-Ferrat, à partir d’interviews et d’observations des cadres de l’existence quotidienne, cette pluridimensionnalité de la richesse a été mise en évidence 1. Mais, parce qu’il a une existence efficace dans bien d’autres registres que celui de la valeur économique des biens possédés, le patrimoine autorise aussi l’existence de la bourgeoisie et de l’aristocratie comme classe pour soi, comme classe mobilisée. La sociabilité est intense. La vie mondaine est faite de variations à l’infini sur la même trame, celle des rituels obligés et des réseaux d’interconnaissance de ceux qui appartiennent au “ grand monde ”. De plus l’existence de patrimoines importants à gérer et à transmettre dans les familles les plus fortunées appelle un tel niveau de formalisation, d’explicitation et de codification pour réussir cette transmission que le groupe mobilisé devient classe.
Le collectivisme des grandes familles
Le collectivisme des grandes familles se manifeste d’abord par leur concentration dans l’espace parisien. Paris est la terre d’élection de la