Si Zoroastre a pu être monothéiste — ou monolâtre[42] —, il apparaît que ses héritiers inclinent vers une re-polythéisation, divinisant les Entités et réintroduisant des divinités antérieures dans une évolution qui peut faire penser à l'Égypte et diverge radicalement de celle du yahwisme judaïque. Cette tendance s'accentue au sein de l'empire perse[43], dans un processus de re-mythologisation qui conserve et accentue le dualisme[44]. L'influence du zoroastrisme est débattue mais il est possible qu'elle ait existé dans une certaine mesure sur le judaïsme à partir de la libération des Israélites de Babylone par Cyrus II en 539 av. J.C., à une époque où apparaissent les notions de résurrection, de jugement et de royaume de Dieu, sans qu'on puisse toutefois prouver formellement ces possibles emprunts[45]. Abordée au xixe siècle, l'étude de l'évolution religieuse de l'humanité est un champ de recherches longtemps délaissé, victime d'une part de conceptions souvent « évolutionnistes » sous-tendant la démarche — présupposant un « sens » de l'histoire jalonné d'étapes précises, ou fondé sur l'idée de l'accomplissement d’une rationalité immanente — et, paradoxalement, victime de la spécialisation de la recherche au fil de l'accroissement de la connaissance des religions elles-mêmes. Certains grands noms de la sociologie des religions, parmi lesquels Émile Durkheim, Marcel Mauss, Georg Simmel et Max Weber[17], ont cependant jeté les bases de cette étude. Le sociologue des religions Yves Lambert, développant une grille d'analyse avancée par Karl Jaspers, a proposé la poursuite de cette approche par la sociologie historique et comparée des religions afin de présenter des clefs d'analyse pour l'appréhension du « fait » religieux, sans éluder la singularité de chacun des grands ensembles religieux. Jaspers a souligné la contemporanéité de changements radicaux intervenus à travers de grandes aires civilisationnelles — en Iran, en Palestine, en Grèce, en Inde ou en Chine — entre