Ce coeur qui haïssait la guerre
La poésie de la Résistance
Ce coeur qui haïssait la guerrevoilà qu'il bat pour le combat et la bataille !Ce coeur qui ne battait qu'au rythme des marées, à celui des saisons,à celui des heures du jour et de la nuit,Voilà qu'il se gonfle et qu'il envoie dans les veinesun sang brûlant de salpêtre et de haine.Et qu'il mène un tel bruit dans la cervelle que les oreilles en sifflent5 .Et qu'il n'est pas possible que ce bruit ne se répande pas dans la ville et la campagneComme le son d'une cloche appelant à l'émeute et au combat.Écoutez, je l'entends qui me revient renvoyé par les échos.
Mais non, c'est le bruit d'autres coeurs, de millions d'autres coeursbattant comme le mien à travers la France.Ils battent au même rythme pour la même besogne tous ces coeurs,10.Leur bruit est celui de la mer à l'assaut des falaisesEt tout ce sang porte dans des millions de cervelles un même mot d'ordre :Révolte contre Hitler et mort à ses partisans !Pourtant ce coeur haïssait la guerre et battait au rythme des saisons,Mais un seul mot : Liberté a suffi à réveiller les vieilles colères15. Et des millions de Francais se préparent dans l'ombreà la besogne que l'aube proche leur imposera.Car ces coeurs qui haïssaient la guerre battaient pour la libertéau rythme même des saisons et des marées,du jour et de la nuit.
(Salpêtre : poudre utilisée pour la fabrication des explosifs)
Références précises du poème : Poème extrait du recueil Destinée arbitraire publié en 1975 à titre posthume (= après la mort de son auteur). Poème d'abord publié clandestinement dans la revue L'Honneur des poètes , le 14 juillet 1943 sous le nom de Pierre Andier.
Brève biographie de l'artiste : Robert Desnos (1900 à Paris - 8 juin 1945 à Térézin). Entre 1918 et 1920, il découvre le mouvement Dada puis rencontre André Breton et devient un membre actif du groupe surréaliste. Il travaille comme journaliste, publie des chroniques cinématographiques et écrit beaucoup de poèmes. Il