central park
Central Park roman 4/281
Les choses qui vous échappent ont plus d’importance que les choses qu’on possède.
Somerset MAUGHAM
Première partie
Les enchaînés
1
Alice
Je crois qu’en tout homme, il y a un autre homme. Un inconnu, un Conspirateur, un Rusé.
Stephen KING
D’abord le souffle vif et piquant du vent qui balaie un visage.
Le bruissement léger des feuillages. Le murmure distant d’un ruisseau. Le piaillement discret des oiseaux. Les premiers rayons du soleil que l’on devine à travers le voile de paupières encore closes.
Puis le craquement des branches. L’odeur de la terre mouillée. Celle des feuilles en décomposition. Les notes boisées et puissantes du lichen gris.
Plus loin, un bourdonnement incertain, onirique, dissonant.
Alice Schäfer ouvrit les yeux avec difficulté. La lumière du jour naissant l’aveuglait, la rosée du matin poissait ses vêtements. Trempée de sueur glacée, elle grelottait. Elle avait la gorge sèche et un goût violent de cendre dans la bouche. Ses articulations étaient meurtries, ses membres ankylosés, son esprit engourdi.
Lorsqu’elle se redressa, elle prit conscience qu’elle était allongée sur un banc rustique en bois brut. Stupéfaite, elle découvrit soudain
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qu’un corps d’homme, massif et robuste, était recroquevillé contre son flanc et pesait lourdement sur elle.
Alice étouffa un cri et son rythme cardiaque s’emballa brusquement.
Cherchant à se dégager, elle bascula sur le sol puis se releva dans le même mouvement. C’est alors qu’elle constata que sa main droite était menottée au poignet gauche de l’inconnu. Elle eut un mouvement de recul, mais l’homme resta immobile.
Merde !
Son cœur pulsa dans sa poitrine. Un coup d’œil à sa montre : le cadran de sa vieille Patek était rayé, mais le mécanisme fonctionnait toujours et son calendrier perpétuel indiquait : mardi 8 octobre,
8 heures.
Bon sang ! Mais où suis-je ? se demanda-t-elle en essuyant avec sa
manche