Chanson
Léopold sont restés enfermés dans des conditions de vie auxquelles ils ont dû se résigner.
Par contre, chez l’un et l’autre cette détresse engendre aussi la révolte. Madeleine fuit la réalité dans un silence qui symbolise à ses yeux sa force et contient sa violence intérieure. Elle avoue à son fils : « […] dans le milieu du silence, la tempête arrive. » (l. 21). À l’intérieur d’elle-même, elle « [fait] des scènes qui durent des heures », elle précise : « des scènes tellement violentes […]
J’démolis la maison ou ben j’y mets le feu, j’égorge ton père, j’fais même pire que ça… » (l. 27-29)
De son côté, la révolte de Léopold s’exprime par le contraire du silence, par ce cri de désespoir que constitue le « sacre ». Chez Tremblay, le « joual » est associé à la fois à l’aliénation et à l’expression du désir de se libérer. Le monologue de Léopold est le plus parfait exemple de ce besoin d’exprimer sa détresse poussé à sa limite : « Hostie ! toute ta tabarnac de vie à faire la même tabarnac d’affaire en arrière de la même tabarnac de machine ! Toute ta vie ! » (l. 11-12) Ici, le procédé de répétition contribue d’ailleurs à accentuer l’expression de la révolte. Dans son langage sans retenue, Léopold s’indigne contre son passé et contre son avenir : « Quand j’me suis attelé à c’te ciboire de machine-là, j’étais quasiment encore un enfant ! […] Mais dans vingt ans, j’s’rai même pus un homme… » (l. 20-21) Mais ce besoin de libération a-t-il d’autre issue que d’aller boire à la taverne (l. 30) ou d’espérer que « les enfants s’instruisent » et connaissent autre chose (l.